samedi 20 décembre 2014

Les plaies de la Novorussie

La tragédie de Donbass passée sous silence (Interview) {LVDR}

Tatiana Santi

20 décembre 2014
Un autre témoignage d'un intellectuel italien venu dans le Donbass pour voir et comprendre ce qui se passe là. Son récit.

Photo : Eliseo Bertolasi
Des écoles détruites, des églises et des hôpitaux anéantis – tel est le paysage qu’on peut voir aujourd’hui dans de nombreuses villes de Donbass. Comment les gens vivent-ils parmi les ruines ? Des explosions d’obus dirigés contre les civils et l’infrastructure éclatent à proximité du cœur de l’Europe et les médias italiens passent ces faits sous le silence.

Pour avoir des éclaircissements à ce sujet, La Voix de la Russie a contacté Eliseo Bertolasi, anthropologue italien et professeur à l’École des Hautes études politiques et des sciences connexes, qui se trouve actuellement à Donbass.

Eliseo Bertolasi est arrivé à Donbass il y a quelques jours et a pu visiter plusieurs villes de la région de Lougansk, notamment Lougansk même, Pervomaïsk et Novosvetlovka, une petite ville à 10 km de Lougansk.

Photo : Eliseo Bertolasi

La Voix de la Russie : Que se passe-t-il dans ces villes ? La trêve est-elle respectée ?

Photo : Eliseo Bertolasi
Eliseo Bertolasi : J’ai entendu des tirs d’artillerie le 15 décembre, dans l’après-midi, lorsque je me trouvais à Lougansk. J’ai entendu ces tirs pendant une heure. Il est évident que les gens veulent que la paix s’installe le plus vite possible, mais ils ne croient pas que la guerre se terminera bientôt. À Lougansk, la vie semble s’améliorer lentement. Mais la situation reste très difficile dans les villages, car tout y est détruit et l’hiver a déjà commencé. Les gens survivent principalement grâce à l’aide humanitaire qui vient de Moscou. Nous savons que Kiev a arrêté de verser les retraites et les allocations aux habitants de la région, et les cosaques du bataillon humanitaire ont ouvert des points de distribution, où les habitants peuvent obtenir de la nourriture et des médicaments. Ils essaient de soutenir matériellement et psychologiquement les habitants de Donbass, épuisés par cette guerre.

J’ai l’impression que la République populaire de Lougansk vit sous un régime de mobilisation, tous les gens essayant d’aider ceux qui sont restés ici. Il y a de l’entraide entre les habitants de la région.

Photo : Eliseo Bertolasi

La Voix de la Russie : Les villageois sortent-ils dans la rue ? À quoi ressemble le quotidien des personnes qui vivent dans les villes détruites par les affrontements armés ?

Photo : Eliseo Bertolasi
Eliseo Bertolasi : À Pervomaïsk et Novosvetlovka, je n’ai vu presque personne dans les rues. Depuis le début des affrontements, la plupart des habitants ont fui du côté russe de la frontière. Les personnes handicapées et les personnes âgées, qui ont du mal à se déplacer sont presque les seules à rester dans ces villes. Ils vivent tous dans une misère absolue et comptent sur l’aide humanitaire des cosaques. J’ai visité l’hôpital de Novosvetlovka, ou du moins ce qu’il en est resté. Le médecin, avec lequel je discutais, pleurait, lorsqu’il me racontait ce qu’il a vu. Les habitants locaux appellent l’artère, qui traverse le village, « route de la vie ». Cette route relie Lougansk avec la Russie. C’est grâce à elle que les habitants ont pu fuir vers la Russie et c’est par cette route que transitent les convois humanitaires de Moscou.

En été, l’armée ukrainienne a tenté de bloquer cette route et a entouré le village de tous les côtés. Ensuite, les forces de la République populaire autoproclamée de Donetsk sont passées à l’offensive et ont repoussé les troupes de Kiev. Le trafic sur la route a repris. Le siège de Novosvetlovka a duré un mois. C’est terrible, ce que j’ai vu ici. Tout a été détruit : les hôpitaux, les écoles, les canalisations. Ils ont même tiré sur les églises.

Photo : Eliseo Bertolasi

La Voix de la Russie : De quel côté tirait-on ? Quelle est la réaction des civils aux bombardements ?

Eliseo Bertolasi : Novosvetlovka se trouve sur une route qui a été bloquée par les troupes ukrainiennes. Les destructions ont été réalisées par ces troupes, me dit-on. Les habitants de la région disent cependant que les bataillons de la Garde nationale sont bien pires, car ils sont sans pitié par rapport aux civils. Tels sont les faits. Lorsqu’on me dit que les défenseurs de Lougansk tirent sur leurs propres forces pour accuser ensuite Kiev, cela me fait rire. Que ceux qui croient ces histoires, se rendent dans la région et voient de leurs propres yeux ce qui s’y passe.



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Photos : Eliseo Bertolasi







































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